Le taux de chômage est en baisse structurelle depuis 2015 en France métropolitaine, dans la région Auvergne Rhône-Alpes et en Haute-Savoie. Il n’avait jamais été aussi bas à la fin du 2^e trimestre 2023, ce qui a également pour effet d’accroître les difficultés de recrutement dans certains secteurs d’activité en tension.

En 2020, la Haute-Savoie avait été particulièrement touchée par la crise du Covid-19: certains des moteurs essentiels du département ont été très touchés par la pandémie (tourisme, décolletage, commerce et restauration). Le département était du même coup passé du 6^e au 21^e rang du taux de chômage le plus faible de France métropolitaine. Trois ans plus tard, la Haute-Savoie est redevenue 9^e de ce classement. Surtout, les départements qui la précèdent sont tous des départements plus ruraux, que les demandeurs d'emploi sont souvent contraints de quitter pour accroître leur chance de retour à la vie active (Lozère, Cantal, Manche, Mayenne, Deux-Sèvres, par exemple). Au contraire, parmi les départements avec une forte dynamique démographique identifiés précédemment, la Haute-Savoie connaît un taux de chômage plus faible que chacun d’entre eux (par exemple, 9,8% dans l’Héraut).

Le taux de chômage en Haute-Savoie s'établit dans une fourchette constante entre 6,2 et 7,6% depuis la crise de 2009. Ce taux, légèrement plus haut que la définition théorique du “plein emploi”, doit surtout se lire au regard de l’écart entre le taux de chômage haut-savoyard et le taux de chômage national. En 2021, lorsque l'impact du COVID s'est répercuté sur les statistiques de la demande d'emploi, l’écart était de 0,9 point en faveur du département : il s’agit ainsi de l’écart le plus faible depuis 1982. Même si l'écart entre le taux haut-savoyard et le taux national s'est à nouveau creusé depuis (+1,7 point mi 2023), il se retrouve surtout, sur tous les territoires observés, à un point bas historique : 5,2% de chômage en Haute-Savoie, mais aussi 6% en Auvergne-Rhône-Alpes et 6,9% en France métropolitaine.

Si l'on peut s'en féliciter, il témoigne d’une problématique structurelle du chômage français, voire européen, plutôt que du département de la Haute-Savoie. La situation de plein emploi est d’autant plus inquiétante qu’elle confirme la pression extérieure sur le département et les grandes difficultés de recrutement rencontrées depuis plus d'un an. Des difficultés qui sont amplifiées par la situation du marché de l'emploi à Genève et en Suisse : le taux de chômage y est réduit au chômage frictionnel avec 1,9% sur l’ensemble du pays et 3,5% spécifiquement sur le canton de Genève mi-2023. 

A l'heure du Papy Boom, nos territoires ne parviennent plus à remplacer les cohortes d'actifs arrivant à l'âge de la retraite, autrement qu'en comptant sur une main d’œuvre extérieure. Dès lors, la concurrence fait rage entre les employeurs pour attirer des salariés, mais l'avantage salarial en faveur de la Suisse est tel que cette concurrence alimente toujours plus les flux de frontaliers, et par répercussion le solde migratoire du département.